Janvier 2019 / N°06
Dossier
La PPE, où en est-on ?

________

La PPE est issue de la loi relative à la Transition énergétique pour la croissance verte. Elle fixe les priorités d’action des pouvoirs publics français dans le domaine de l’énergie (à l’horizon 2028) et constitue un outil majeur pour la mise en œuvre de l’Accord de Paris sur le climat.

________


LES CONCLUSIONS TIRÉES DU DEBAT PUBLIC

Organisé du 19 mars au 30 juin 2018, le débat public sur la révision de la Programmation pluriannuelle de l’énergie a rassemblé au total près de 8 000 participants physiques et plus de 47 500 visiteurs sur internet. La Commission particulière du débat public (CPDP) et son président Jacques Archimbaud présentaient officiellement mercredi 12 septembre 2018 les enseignements clés de cette expérience de démocratie participative.

Tout d’abord, la priorité pour les citoyens français semble être la lutte contre le changement climatique et les émissions de gaz à effet de serre, et la majorité se déclare favorable à une véritable augmentation de la part des énergies électriques renouvelables, de la biomasse et du biogaz. Un intérêt croissant se dégage également en matière de d’innovation relative au stockage et d’hydrogène. Ce soutien global aux énergies renouvelables est néanmoins nuancé par certaines craintes liées à leurs éventuels « impacts environnementaux, locaux ou globaux », précise le bilan.

Compte tenu de ces observations, la CNDP formule dans ce rapport officiel plusieurs recommandations à destination du maître d’ouvrage concernant les grandes orientations à tenir en matière de politique énergétique.

 

LES OBJECTIFS ET LES MOYENS POUR 2019

Deux priorités ont été identifiées pour 2019 :  réduire la consommation d’énergies fossiles et assurer une transition juste et durable.

Afin de respecter les engagements de la France en matière de réduction des gaz à effet de serre et parvenir à la neutralité à l’horizon 2050, les objectifs ont été revus à la hausse : -40% de consommation d’énergies fossiles d’ici à 2030 (par rapport à 2012). Les principaux leviers de baisse de la consommation d’énergie fossile sont dans les secteurs du bâtiment et de la mobilité.

 

  • La rénovation énergétique des bâtiments, premier secteur prioritaire

Des mesures phares ont été annoncées telles que le remplacement de la moitié des chauffages au charbon subsistants et d’un tiers des chaudières à fioul d’ici à 2023. L’objectif des 500 000 rénovations par an, dont la moitié pour des ménages modestes, a également été maintenu. De même, les aides à la réalisation de travaux visent à être plus accessibles pour tous les ménages, ce qui se traduit par une extension du Crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE) ou encore de l’éco-prêt à taux zéro.

Pourtant cet objectif de rénovation, formulé déjà en 2012, reste très loin d’être atteint du fait de son sous-financement public. Le projet de loi de finance 2019 prévoit la quasi-division par deux du crédit d’impôt transition énergétique (Cite) alors qu’il apparait comme le principal outil dédié à la rénovation dans le parc privé. Pour atteindre les objectifs de la PPE, il faudrait investir entre 19 et 22 milliards d’euros par an, soit 6 à 8 milliards supplémentaires.

 

  • Les mobilités, second domaine prioritaire

Ce sont 1 millions de français qui devraient bénéficier de la prime à la conversion, une aide pour changer de véhicule, d’ici à 2023, avec en prime un complément accordé aux citoyens modestes habitant loin de leur lieu de travail. L’objectif de la nouvelle PPE est ainsi de parvenir à 1.2 millions de voitures électriques en circulation en 2023.

Or, si l’automobile est bien un levier essentiel dans la réduction des gaz à effet de serre, la nouvelle PPE aborde peu les transports en commun et les mobilités douces (vélo, marche). Limiter l’étalement urbain et réduire les distances domicile-travail est également un enjeu qui a été jugé trop peu mis en avant par la programmation pluriannuelle de l’énergie.

 

  • Les défis du mix électrique

L’objectif du gouvernement, dans une volonté de transition juste et équitable, est que le prix de l’électricité soit parmi les plus compétitifs en Europe. Il invite ainsi à travailler sur la compétitivité des énergies renouvelables et à coopérer avec les autres pays européens. La PPE 2019 a, dans ce domaine, mis en lumière plusieurs mesures phares :

Charbon : L'exécutif prévoit la fermeture de toutes les centrales électriques fonctionnant exclusivement au charbon d’ici à 2022. Toutefois, le ministre de la Transition écologique est revenu sur sa décision le 11 janvier 2019, en annonçant que seule la centrale à charbon de Cordemais (44) aura la possibilité de fonctionner au-delà de 2022 pour garantir l'approvisionnement en électricité de la Bretagne, mais sans le soutien financier de l'Etat. Pourquoi cette exception ? Parce qu’EDF y teste un dispositif de co-combustion baptisé Écocombust, à base de biomasse.

Nucléaire : L’objectif d’une diversification du mix électrique et d’une réduction du nucléaire à 50% de la production électrique totale d’ici à 2035 a été maintenu. Entre-temps, ce sont 14 réacteurs parmi les 58 français qui devront être arrêtés, et ce mouvement commencera avant l’été 2020 avec l’arrêt définitif des deux réacteurs de Fessenheim.

Il s’avère néanmoins que cette annonce implique la construction de nouveaux réacteurs pour remplacer ceux qui arriveront en fin de vie, dans la limite des 50 % fixés par la loi de transition énergétique. « Le rythme variera en fonction de l’évolution du mix énergétique dans notre propre pays et chez nos voisins européens » a déclaré le gouvernement qui souhaite en effet conserver une capacité industrielle de construction de nouveaux réacteurs nucléaires pour des enjeux de souveraineté. Le texte publié le 25 janvier prévoit ainsi que la France vende à ses voisins près du double de ce qu'elle exporte aujourd'hui.

Enfin, le projet de PPE repousse à mi-2021 la décision de construire de nouveaux réacteurs de type EPR.

Energies renouvelables : Cette nouvelle PPE présente la large ambition de tripler le parc éolien terrestre et du multiplier par cinq le photovoltaïque à l’horizon 2030. Les ambitions sont cependant moins importantes pour l'éolien en mer dont le développement peine à décoller.

Malgré ces annonces ambitieuses, la France affiche un grand retard sur ses objectifs pour l’électricité verte aux horizons 2020 et 2030 définis par la loi de transition énergétique. Le graphique ci-dessous présente ainsi le décalage entre les tendances passées et visées concernant la consommation d’énergie, d’électricité, de chaleur, de carburant et de gaz à partir d’énergies renouvelables.

Source : SDES – Alternatives économiques

L’objectif reste celui de la loi de 2015 : atteindre une part de 40 % d’électricité renouvelable en 2030 (contre 17 % seulement en 2017). Cela représente des investissements majeurs dans les territoires, notamment des territoires ruraux.

 

  • La question brulante des taxes sur le carburant

Le cap du gouvernement actuel est réaffirmé avec cette nouvelle PPE : la valeur de la tonne de CO2 devra atteindre 86 euros en 2022, et les hausses fiscales annuelles sont maintenues. Le calendrier de hausse des taxes sur le carburant devra cependant tenir compte des fluctuations du baril.

Mais la révolte des gilets jaunes a conduit l’exécutif à vouloir réviser sa méthode. Le Premier ministre Édouard Philippe a annoncé en décembre renoncer aux mesures fiscales concernant le prix des carburants et les prix de l’énergie qui devaient entrer en vigueur au 1er janvier 2019. La question de la taxe carbone n'a ainsi pas été détaillée dans la publication du 25 janvier dernier, sa trajectoire dépendant désormais des conclusions du grand débat.


LES DÉFIS DE 2019

Un des enjeux essentiels pour le gouvernement dans les mois à venir sera de réussir à mettre en place les objectifs sectoriels annoncés, et d’assurer leur cohérence avec la cible de neutralité carbone à long terme. Le projet doit désormais être discuté au sein de plusieurs instances, et soumis au public, par internet, à l'issue de l'avis rendu par l'Autorité environnementale.

 

Le Comité 21 Grand Ouest rappelle également la réelle nécessité de mieux intégrer les énergies marines renouvelables dans le mix énergie, et de mettre en avant leur importance dans les plans d’orientation énergétiques à venir.

Enfin, la PPE devra se saisir de la question de l’énergie collaborative. Ces projets qui portent sur l’ensemble des filières renouvelables (photovoltaïque, bois-énergie, éolien, hydraulique, méthanisation…) concrétisent aujourd’hui un modèle décentralisé, s’appuient sur les ressources locales et bénéficient à l’économie du territoire. L’atelier du 5 juin 2019 organisé par le Comité 21 Grand Ouest s’emparera ainsi du sujet !

 

EN SAVOIR PLUS

> Sur la publication officielle de la PPE par le gouvernement

> Sur les actions du Comité 21 Grand Ouest en lien avec la transition énergétique

 

ADHÉREZ AU COMITÉ 21 GRAND OUEST

Vous souhaitez participer aux transformations de la société, vous engager et devenir un acteur de celles-ci ? Rejoignez le réseau des acteurs du développement durable.

J'adhère