Le magazine des acteurs du développement durable dans le Grand Ouest / Novembre 2018 / N°05
Dossier
Quand l'Economie Sociale et Solidaire transforme l'entreprise traditionnelle

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Missions d'intérêt général, management participatif, ancrage territorial... L’ESS a amorcé un changement dans le paysage économique actuel. Pourtant, les discussions autour de la loi Pacte montrent bien que les entreprises traditionnelles peuvent aussi contribuer à ce mouvement.

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NOVEMBRE, LE MOIS DE L'ESS !

En novembre se tiendra la 11ème édition du « Mois de l’ESS », l’occasion pour les Chambres Régionales de l’Economie Sociale et Solidaire d’animer une plateforme en ligne qui recense tous les événements ayant lieu sur le territoire national. Les régions des Pays de la Loire et de Bretagne y sont particulièrement représentées, au travers de projections de films, conférences, portes ouvertes, salons, expositions, animations ludiques et éducatives, et même concerts. Toutes les villes du Grand Ouest animeront des événements visant à mettre en avant des structures qui font avancer le secteur.

Il faut dire que la Bretagne et les Pays de la Loire font partie des régions françaises les plus dynamiques sur l'ESS (en particulier pour l'emploi). Pourquoi un tel succès ? Parce que l’Economie Sociale et Solidaire est une autre façon de concevoir l’entreprise, son mode d’organisation et sa finalité. Sous la forme de coopératives, de  mutuelles, d'associations, les structures de l’ESS partagent des valeurs communes : l’intérêt général, la liberté d'adhésion, une gouvernance démocratique, une gestion responsable et un ancrage fort sur les territoires.

Comme en témoigne le récent « Manifeste étudiant pour un réveil écologique », de plus en plus de salariés se tournent vers des entreprises qui prennent en considération leur impact environnemental et social. Le schéma de l’entreprise classique, son fonctionnement et surtout son rôle dans la société sont plus que jamais questionnés. L’ESS et les valeurs défendues par les acteurs du secteur ont en effet le vent en poupe : le nombre d’emplois dans le secteur explose. Les mutlinationales comme les petites et moyennes entreprises ne peuvent plus ignorer cet engouement, et semblent avoir tout à gagner à s’inspirer des pratiques de l’ESS.

 

L’ESS EST-ELLE EN TRAIN DE TRANSFORMER L'ENTREPRISE ?

  • Une redéfinition de la finalité de l’entreprise  

Le modèle classique de l’entreprise, à finalité uniquement lucrative et priorisant l'intérêt économique de court terme, se confronte aujourd’hui à une prise de conscience des consommateurs, qui profite à l’émergence d’un nouveau modèle : l'entreprise contributive. Celui-ci amène à repenser le rôle traditionnel de l’entreprise, et notamment son rapport à la société et l’intérêt général.  

Le projet de loi sur la croissance et la transformation des entreprises (Pacte) qui a été voté par l’Assemblée Nationale mardi 9 octobre lance bel et bien une réflexion et un mouvement de responsabilisation des entreprises. Celui-ci affirme « la nécessité pour les entreprises de prendre en considération des enjeux sociaux et environnementaux de leur activité », et offre la possibilité aux entreprises de se doter d'une raison d'être dans leurs statuts, dont celui d'entreprise à mission. 

Les groupes SEB ou Michelin qui investissent dans des matériaux plus durables et prolongent la durée de vie de leurs produits, Guerlain qui investit dans des filières d’approvisionnement plus vertes, les exemples de transformation de comportements sont nombreux parmi les grands groupes, mais aussi parmi les plus petites structures. Elles sont aussi le témoin de l’importance grandissante de la RSE. Ces entreprises s’inspirent ainsi particulièrement des organisations de l’ESS, qui sont nées directement d'un modèle mettant l'impact social et environnemental au cœur de leurs activités. 

 

  • Une transformation des modes de gouvernance 

L’ESS a amorcé une mutation profonde dans la gouvernance des entreprises, en introduisant le principe "une homme, une voix". Ce mode de gouvernance partagée, principe majeur de l’entreprenariat social, bouleverse les formes de gouvernance traditionnelle de l’entreprise, hiérarchisée et priorisée au profit des dirigeants.  

Les modalités de dialogue et de pouvoir avec les parties-prenantes ont aussi été remises en question, et la loi Pacte en est bien le témoin. Le projet de loi entérine en effet la RSE comme socle de l’entreprise, en incitant à la prise en compte stratégique des enjeux sociaux et environnementaux, mais aussi en offrant la possibilité de renforcer la présence des représentants salariés dans les conseils d'administration. Ainsi l’entreprise pourra prendre le titre « d’entreprise à mission » en incluant les parties-prenantes dans un comité d’impact. Le rôle des parties-prenantes est donc transformé, en leur donnant l’opportunité réelle et la légitimité légale d’interpeller les dirigeants sur les choix stratégiques de l'entreprise. 

 

  • Une mutation des formes de travail  

A ces transformations liées à la gouvernance et à la finalité des entreprises s’ajoute une mutation dans les conditions d'exercice du travail. Les entreprises d’aujourd’hui sont marquées par une aspiration à envisager le travail selon un mode collaboratif. Cette tendance s'appuie sur le mouvement de l’ESS, qui a popularisé les notions de « co-direction », « co-décision », « co-working », ou encore « d'empowerment ». La multiplication des espaces de travail partagé (Tiers-lieux[1]) en France en est bien l’illustration.

 

COLLABORATION(S) ET BENEFICES MUTUELS

Si l'ESS reste bien la locomotive de ces transformations, elle doit également s'inspirer des entreprises traditionnelles dans leur capacité à se développer, à mutualiser les coûts et à innover. Dès lors, la collaboration entre ESS et économie « classique », s'appuyant sur une connaissance réciproque, ainsi que sur des échanges d'éxpériences, de valeurs et de savoir-faire, constituent des atouts certains pour les deux secteurs et pour l'économie régionale. A terme, elle permettra d'apporter des réponses innovantes sur les questions environnementales, sociales et éthiques.

 

> Plus d'informations sur le mois de l'ESS

 

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[1] Le Tiers-Lieux se compose généralement d’espaces dédiés au travail indépendant ou télé-travail, de bureaux mutualisés pour de petites structures (en “co-working”), des FabLabs (laboratoires de fabrication avec des machines professionnelles mises en commun), des espaces de convivialité et de partage comme les potagers, vente de produits en circuits courts...

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